Qu’est-ce que la “responsabilité de plein droit” du e-commerçant ?


L’article 15 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique prévoit que “[le e-commerçant] est responsable de plein droit à l’égard de l’acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par [lui]-même ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci. Toutefois, [il] peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable, soit à l’acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure.

La responsabilité “de plein droit” s’oppose classiquement à la responsabilité “pour faute”, en matière par exemple de responsabilité des parents du fait de leurs enfants depuis le fameux arrêt Bertrand de 1997. Est-ce à dire que le e-commerçant est systématiquement tenu d’une obligation de résultat ? La solution ferait frémir, et pour cause : dans le cas de services fournis en ligne, elle imposerait d’indemniser l’utilisateur dès lors que ces services sont temporairement inaccessibles, par exemple pour motif de maintenance.

Fort heureusement, tel n’est pas le sens de la responsabilité de plein droit, laquelle a trait non pas à la nature des obligations (de moyens ou de résultat), mais à l’imputation de la responsabilité qui résulte de leur inexécution, dans le souci d’une bonne indemnisation de la personne lésée : comme le parent, le e-commerçant est érigé en “guichet unique”, tenu d’assurer l’indemnisation quand bien même l’inexécution aurait pour origine le comportement de son sous-traitant (de son enfant) – à charge pour lui de se retourner ensuite contre ce sous-traitant. La responsabilité de plein droit est ainsi une responsabilité “du fait de”, ayant pour objet de distinguer entre la personne cause de l’inexécution et la personne chargée de l’indemnisation.

Encore faut-il, donc, caractériser une inexécution ! Si l’obligation de continuité du service, par exemple, ne s’analyse qu’en une obligation de moyens (comme c’est le cas en général), la simple fermeture temporaire pour maintenance ne saurait constituer une inexécution ; la question de l’imputation de la responsabilité sera dans ce cas sans objet, faute précisément de fait générateur de responsabilité. Pour le e-commerçant avisé, il y a donc lieu de définir d’autant mieux, dans les conditions générales qui le lient à l’utilisateur, la nature et l’étendue de ses obligations, pour couper court dans bien des litiges à toute application du fameux article 15.

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