La Maj d'

La newsletter d'actu techno-juridique : tous les mardis matin à 9h, faites la mise à jour !

En cliquant sur “S’abonner”, vous consentez à recevoir la newsletter d’Aeon (la “Maj”) chaque mardi matin à l’adresse email que vous avez indiquée. Les données saisies dans les champs ci-dessus nous sont nécessaires pour vous adresser la Maj par l’intermédiaire de notre prestataire MailChimp, et ne sont utilisées qu’à cette fin.

Vous consentez également à ce que MailChimp collecte, par l’intermédiaire d’un traceur placé dans l’email contenant la newsletter, des informations relatives à l’ouverture de cet email et à votre lecture de la Maj. Ces informations ne sont utilisées par Aeon qu’aux fins d’améliorer la Maj et son contenu, et ne sont partagées avec aucun tiers hormis le prestataire MailChimp.

Si vous souhaitez lire la Maj sans que ces informations soient collectées, notez que vous pouvez la retrouver à tout moment à cette adresse aeonlaw.eu/maj. Vous pouvez également vous abonner au flux RSS de cette page pour être averti de chaque nouvelle Maj dès sa parution, en cliquant ici !

Pour plus d’informations, consultez la Politique de Confidentialité d’Aeon en cliquant ici.


Celle qui ne LOL pas du tout – Maj du 12/02/19

L'actu en bref

Cette semaine aura été placée sous le thème des relations sur Internet : pendant que les données du Grand Débat National étaient rendues ouvertes sur data.gouv.fr, le Président s’insurgeait contre l’anonymat sur Internet, Webedia, la société éditrice du forum jeuxvideo.com, adhérait au Code de conduite de l’UE, et Jeff Bezos, le patron d’Amazon, rendait publique une tentative d’extorsion dont il est victime. Une semaine également placée sous le sceau de l’impôt, avec 500 millions d’arriérés payés par Apple, et un chiffre étonnant pour Google qui paie désormais plus en amendes qu’en impôts en Europe, et qui était spéciale pour Facebook, qui a soufflé ses 15 bougies tout en rachetant une entreprise dans le domaine de la blockchain et en subissant un important revers judiciaire sur la combinaison de données issues de différents services en Allemagne (communiqué du tribunal, version The Verge). À noter également, la finalisation du collège de la CNIL qui se réunira pour la première fois jeudi, le rebranding de Chauffeur Privé en “Kapten”, la décision du tribunal administratif de Guadeloupe d’ordonner à l’université des Antilles la publication des algorithmes locaux de sélection Parcoursup et l’intention de l’université de se pourvoir en cassation, l’irruption d’Amazon dans la voiture autonome, d’éventuels liens entre des chercheurs de Stanford et les bébés “OGM” de He Jiankui, la reprise de la guerre entre Paris et Airbnb, et de belles décisions à venir sur la surveillance de masse par la CEDH. On se quitte sur des publications en ligne de service public : la mise en ligne du cadastre et du dictionnaire de l’Académie.

Faites la Maj, et à la semaine prochaine !

Le nom peut sembler anodin, et pourtant il n’en est rien : depuis vendredi, la twittosphere bruisse du nom de la “Ligue du LOL“, un groupe Facebook qui aurait servi de base d’organisation pour des actes de cyber-harcèlement sexiste, raciste et homophobe par des journalistes travaillant actuellement dans les plus grandes rédactions de France. Dévoilé par Libération, pour qui travaill(ai)ent le fondateur et un membre actif du groupe, le groupe fait aujourd’hui (un peu tard) son mea culpa, ce qui ne nous empêchera pas de nous pencher sur le phénomène spécifique du cyber-harcèlement.

L’amplificateur social

Le harcèlement a toujours existé, sous une forme ou une autre : qu’il s’agisse de bullying, forme de persécution souvent physique exercée à l’école, ou de harcèlement moral au travail, ses formes dans la vie “loin du clavier” (AFK) sont aussi multiples que difficiles à réprimer. Les caractéristiques du harcèlement en font souvent une infraction compliquée à constater et poursuivre : les assaillants ne sont pas toujours à visage découvert, les preuves flagrantes ne sont pas toujours simples à amasser, et la pression morale et physique qu’ils exercent est telle que la victime a rarement la possibilité de les dénoncer par peur des représailles. Un enfant sur trois est harcelé à l’école, 3 millions de femmes ont subi du harcèlement de rue en 2017, et 1 femme sur 5 est confrontée à du harcèlement sexuel au travail au cours de sa vie.

Dans ces circonstances, le numérique n’apparaît pas tant comme un facteur nouveau mais plutôt comme un amplificateur : la facilité et l’instantanéité des échanges cumulées à une impression d’anonymat font qu’il est plus simple, techniquement et intellectuellement, de s’organiser pour cyber-harceler. C’est ainsi que l’on voit régulièrement des hordes d’internautes déferler sur telle vidéo youtube ou telle députée. C’est trop rapidement oublier que le web, comme le numérique, a beau être virtuel, il n’en reste pas moins bien réel : une action numérique peut avoir des conséquences parfaitement tangibles. C’est pourquoi le harcèlement, qu’il soit cyber ou non, est réprimé pénalement. Pis, la circonstance que le harcèlement est cyber est en fait une circonstance aggravante depuis 2014 : le rôle potentiellement amplificateur du web est ainsi pris en compte par le législateur pour réprimer plus durement un acte rendu plus simple à accomplir.

Liberté vs sécurité : l’anonymat face au harcèlement

Le constat est aujourd’hui dressé par le gouvernement comme sa majorité parlementaire que l’arsenal judiciaire actuellement en place ne suffit plus à lutter contre la prolifération et la diversification des faits de cyber-harcèlement. Le récent rapport Avia préconise de s’inspirer des dispositions allemandes en imposant un délai de 24h pour le retrait par les plateformes intermédiaires de certains contenus mis en ligne par leur biais, tout en promouvant, entre autres mesures, un observatoire de la cyber haine. Encore plus récemment, c’est le Président de la République lui-même qui a pris position contre l’anonymat sur “les plateformes Internet” pour lutter contre le harcèlement scolaire.

Si l’on peut comprendre les intentions louables qui sous-tendent cette déclaration, il est loin d’être certain qu’il s’agisse là de la solution. Tout d’abord parce que le web n’est pas si anonyme que l’on veut bien le croire : les plateformes Internet ont déjà des obligations de conservation de données qui, croisées avec les données détenues par les fournisseurs d’accès Internet, permettent régulièrement la poursuite de tous types d’infractions, y compris de harcèlement. Ensuite parce qu’il s’agit là de toucher à la délicate balance entre liberté et sécurité, la défense de l’une se faisant souvent au détriment de l’autre. En l’occurrence, la liberté (et non pas la licence) est le principe cardinal de la fondation d’Internet, et c’est elle qui a permis son formidable développement, notamment parce qu’elle irriguait la pensée des concepteurs de son infrastructure même. Il est ainsi essentiel de ne pas légiférer dans la hâte, de manière réactive, mais de bien peser les tenants et aboutissants de toute nouvelle règle, surtout une qui viendrait effriter un pilier du web, déjà plus fragile qu’on ne le pense. Et pendant qu’on réfléchit aux meilleures manières de procéder, on se munit de ce guide anti-cyber-harcèlement de la CNIL.

Le Gif de la semaine


À la semaine prochaine, qu'on espère aussi bonne !