Nous approchons tout doucement de la fin de l’année 2020, objet de tous les mèmes pour ses airs de fin du monde, et voici un sujet sur lequel nous ne paraissons toujours pas avancer : celui de la régulation des géants du numérique, c’est-à-dire celui de la désirabilité et de la faisabilité d’une telle régulation, plus ou moins soft ou rigide. Certes, l’actualité témoigne de volontés fortes en ce sens, sous l’angle premièrement de la lutte contre la haine : une médiation ordonnée entre Twitter et des associations de lutte contre les discriminations, des déclarations du Garde des Sceaux évoquant une possible réforme de la loi de 1881… Les juges et politiques font au mieux avec les outils qu’ils ont – ou voudraient avoir. D’un autre côté, les intéressés suggèrent d’autres pistes, évoquant un procès (pour l’heure principalement médiatique) “excessif” à leur encontre, tandis que Facebook annonce le traitement prochain de premières réclamations d’utilisateurs par sa Cour suprême. Plus loin du discours politique, un professeur des universités nous rappelle quant à lui que la question n’admet sans doute aucune réponse univoque. En tout cas, les débats actuels ont une conséquence : la mise en pause des projets d’expérimentation de la reconnaissance faciale.
La régulation des géants du numérique est aussi affaire de concurrence. Ici, la semaine a porté son lot d’avancées : Google attaquée pour abus de position dominante par le Département de la Justice américain, l’annonce a fait grand bruit, et l’on entend de nouveau parler de “démantèlement de Google”. Mais est-ce vraiment une avancée ? D’aucuns rappellent que le procès n’a finalement rien d’aussi ambitieux que celui qui visait Microsoft à la fin du siècle dernier. La volonté politique aurait-elle régressé ? Ou le problème est-il ailleurs : dans l’incapacité, tout simplement, du droit de la concurrence à résoudre nos problèmes ? Une régulation transverse, transdisciplinaire – voilà ce que pourrait apporter un Digital Single Act bien pesé, qui s’est cette semaine enrichi de nouvelles mesures visant pêle-mêle la modération des contenus et la publicité ciblée, pour un parcours législatif dont nous ne sommes cependant pas encore prêts, manifestement, de voir le bout.
Le reste de l’actualité, enfin, c’est évidemment le changement de nom – et pas de beaucoup plus – de l’application StopCovid (bonjour TousAntiCovid !), mais aussi la démocratisation toujours plus grande des cryptomonnaies, désormais prises en charge (pour certaines) par Paypal, les juges californiens qui maintiennent à leur tour la qualification de salariés des chauffeurs de VTC d’Uber et de Lyft, et la Chine qui semble se préparer à durcir ses lois de protection des données. Le toujours excellent Nextinpact nous propose une immersion dans les coulisses de la plateforme Pharos de l’OCLCTIC, et la Ministre déléguée chargée de la citoyenneté annonce la création d’une unité interministérielle de “contre-discours républicain” sur les réseaux sociaux – une mesure à mettre en perspective avec les dernières métriques publiées par le Conseil de l’Europe concernant le budget de la justice française… À noter également une vague de piratage sur des sites français et une fiche du gouvernement sur comment réagir si cela vous arrive et surtout, la découverte de beaucoup d’eau sur la Lune ! La fin de l’année s’annonce riche, toujours plus riche d’initiatives, de mesures, de projets de normes et de débats – il n’en reste pas moins cet arrière-goût, ce pressentiment malheureux, que tout cela ne va pas aller en s’améliorant. Mais ici nous ne souhaitons que d’être démentis.
Faites la Maj et à la semaine prochaine !