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Celle qui est indomptable – Maj du 24/04/18

En 1998, Lawrence Lessig a prononcé la fameuse maxime “Code is law“. Ce que Lessig cherchait à montrer, c’est qu’au-delà de nos règles de droit, d’autres normes s’appliquent au monde numérique, et parfois celles-ci sont si fortes qu’elles sont droit. Dans un tel cas, faut-il s’efforcer à trouver de nouvelles manières de dompter le numérique, ou faut-il chercher comment concilier avec l’indomptable ?

L’ineffectivité de la règle de droit

Les blockchains publiques, des registres complètement décentralisés d’enregistrements liés aux précédents enregistrements, ont cette particularité que si la majorité du réseau décide de changer le registre, celui-ci sera considéré comme ayant été modifié – ce qu’on appelle un “hard fork“. Cela a déjà eu lieu notamment sur la blockchain Ethereum pour effacer le vol de plusieurs centaines de millions de dollars de cryptomonnaies : afin de minimiser les dommages, la communauté a décidé d’effacer l’enregistrement en question, effectuant un véritable saut temporel dans le passé pour annuler le futur.

C’est précisément l’objet d’un contentieux de groupe qui a lieu aux États-Unis, certains détenteurs d’une cryptomonnaie qui a subi une pareille défaillance souhaitant forcer un tel hard fork afin de récupérer leurs biens. Au-delà des nombreuses questions juridiques soulevées par ce cas précis se pose clairement, plus largement, la question de l’effectivité du droit par rapport à un outil tel que la blockchain. Comment en effet faire exécuter une décision, quelle qu’elle soit (on pense notamment à des hard forks), quand l’exécution de la décision dépend du bon vouloir de la majorité d’un réseau entier ? Le droit se heurte ainsi parfois – souvent avec le numérique – à une barrière qui est celle du fonctionnement même des technologies qu’il tente d’appréhender : impossible de mettre la bride sur une blockchain publique. Un autre exemple d’actualité est celui de la Russie, qui n’arrive pas à bloquer Telegram malgré ses efforts à répétition.

Innover dans la création juridique

Le régulateur est alors forcé de lui-même faire preuve d’innovation – et oserons nous le dire – de disruption dans la matière juridique. On observe plusieurs mouvements concomitants, dont aucun ne semble être LA bonne solution, sans pour autant être foncièrement de mauvaises options. On voit ainsi les frontières s’estomper face à des textes qui étendent leur champ d’application territoriale (RGPD, Cloud Act) ; on voit les acteurs du numérique être astreints à des obligations de transparence renforcées (Loi pour une République Numérique, fake news) ; on voit le recours à l’autorégulation se développer (lutte contre les contenus illicites, codes de bonne conduite) ; on voit le développement des actions de groupe, qui sont consacrées en Europe et en France (Justice 21, RGPD). Toutes ces pistes montrent la réflexion qui a lieu sur la manière dont le droit peut muer pour mieux appréhender le numérique, mais restent toutefois assez sobres.

D’autres idées émergent par ailleurs pour bouleverser la donne – ou créer encore plus de problèmes. Certains avancent ainsi l’idée d’un serment des développeurs et des data scientists, pour imposer une déontologie à ces professions. On pense également au développement fulgurant des legaltechs, qui automatisent certains aspects du droit tout en permettant de mieux comprendre les données issues de la pratique juridique. Mais même avec la progression de ces solutions nouvelles et innovantes, le problème reste entier : comment réglementer une chose si la règle de droit ne peut pas, concrètement, être mise en pratique, parce que cela va à l’encontre des règles inhérentes à la chose elle-même ?

L’actu en bref

Cette semaine, comme on vous le disait, la Commission Européenne a dévoilé un nouveau texte sur l’accès aux preuves électroniques et serait aussi en train de concocter un texte sur la loyauté et la transparence des plateformes (#cocorico) ; le G29 a publié des guidelines sur le consentement et la transparence sous le GDPR ; Facebook, Microsoft et autres se sont engagés à ne pas collaborer avec des États sur la mise en  œuvre de cyberattaques ; la CNIL et BPI France ont publié un guide pratique GDPR à destination des PME ; des sénateurs menacent de saisir le Conseil constitutionnel sur le projet de loi données personnelles ; pour la CADA, l’accès aux documents administratifs ne peut se faire sous forme de PDF scanné ; une blockchain publique (au sens étatique du terme) serait en préparation pour les fréquences libres.

À ne pas rater cette semaine

Sinon cette semaine, vous en apprendrez donc plus sur les actions de groupe, avec un premier article sur la tentative d’obtenir un hard fork judiciaire et un second sur l’action de groupe en matière de données personnelles en cours d’élaboration par la Quadrature du Net. On parle également de la proposition de serment d’Hippocrate pour les développeurs, on fait le point sur les cyberattaques auxquelles la France fait face, et on parle de l’effectivité du droit au travers du cas de Telegram en Russie. Aussi au programme, un article sur la normalisation algorithmique, à savoir l’impact négatif que l’automatisation est susceptible d’avoir sur la diversité – on en parle ici à propos du style. On conclut avec un article à nouveau un peu effrayant sur Palantir, ce géant du net de l’ombre qui est très friand de données, et sur un article optimiste sur l’impact de l’IA sur le travail.

Faites la Maj, et à la semaine prochaine !

Le Gif de la semaine


A la semaine prochaine, avec déceptivité.