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Celle qui replonge dans le bain – Maj du 10/09/19

Contrairement à la Maj, l’actu tech et juridique n’a pas pris de pause estivale, et il était grand temps pour nous de replonger dans le bain ! Face au ras-de-marée d’informations de cet été, une seule solution pour garantir une mise à jour efficace : pas d’édito, et de l’actu en long, en large et en travers !

On commence par prendre des nouvelles de nos géants du net préférés. L’été n’a pas été bon pour Google, qui n’a cessé de boire la tasse : le géant est accusé devant la CNIL irlandaise par Brave, un navigateur Internet concurrent de Chrome, de divulguer des données ciblées à ses annonceurs de manière détournée et contraire au RGPD, et ce alors qu’une amende de 200 millions de dollars par la FTC se prépare en sanction de traitements de données de mineurs et que 48 Etats américains lancent des enquêtes en droit de la concurrence. En d’autres news, YouTube va se battre contre des copyright trolls qui extorquent des Youtubers pendant que sa présidente défend la liberté d’expression sur la plateforme, que les tensions continuent avec les moteurs de recherche indépendants sur l’ouverture à la concurrence d’Android pour permettre le choix d’un autre navigateur que Chrome et que des statistiques sur les taux de clics du moteur de recherche sont enfin dévoilées : on apprend que 50,3% des requêtes effectuées sur Google aux États-Unis en juin 2019 n’auraient abouti sur aucun clic ce qui, selon les points de vue, peut soit signifier que Google remplit excellemment sa fonction de nous procurer l’information que nous souhaitons, soit que Google cherche à être le seul géant du net dans nos vies.

L’orage a également grondé pour Facebook, dont une nouvelle faille de sécurité exposant plus de 419 millions de numéros de téléphone a été dévoilée et ce alors que la CNIL irlandaise a annoncé une enquête sur les écoutes de transcription d’audio utilisateur et qu’une Cour d’appel américaine a autorisé une class action à propos de ses pratiques de reconnaissance faciale. C’est d’ailleurs l’occasion de faire le point sur pourquoi les géants du net font écouter des conversations à des humains et sur comment s’en prémunir. On note aussi le lancement de Facebook Dating aux USA, la création prochaine d’un espace Actualités édité par des journalistes professionnels, le lancement de deux actions judiciaires contre des développeurs d’apps dans l’écosystème Facebook pour des manœuvres frauduleuses et la mise à disposition d’un outil de suppression d’historique qui ne fait en fait que décorréler les données de votre personne – sachant à quel point l’anonymisation, au sens du RGPD, est complexe à réaliser, il est peu probable que cette solution convienne.

L’été n’a pas été beaucoup plus ensoleillé pour Amazon, qui a été condamné à 4 millions d’euros d’amende par le Tribunal de commerce de Paris pour des clauses créant un déséquilibre significatif avec les vendeurs officiant sur la plateforme, et ce à l’initiative de la DGCCRF. Mais ce n’est pas tout : son assistant vocal Alexa fait l’objet d’une enquête par la CNIL luxembourgeoise et un contentieux contre eBay se prépare aux États-Unis à propos d’éventuelles manœuvres de débauchage de vendeurs. Également de la mauvaise presse à la suite de l’annonce que la nouvelle taxe GAFAM française serait répercutée sur les utilisateurs de la plateforme. Cette nouvelle taxe, évidemment jugée discriminatoire par les principaux concernés, a fait l’objet de débats houleux avec les Etats-Unis, aboutissant à un accord durant l’été qui permettra aux entreprises concernées de déduire la taxe – l’occasion de se rappeler pourquoi les GAFAM paient peu d’impôts locaux relativement à leur chiffre d’affaires.

Pas mal d’autres nouvelles dans le monde de la tech : la relation USA-Huawei a connu un nouveau réchauffement ; Anthony Levandowski, ancien ingénieur spécial “voitures autonomes” de Google parti chez Uber, fait l’objet d’une procédure pénale ; le compte Twitter de Jack Dorsey, son président, a été hacké – voici comment se prémunir du type d’attaque qui a fonctionné dans ce cas ; Snap lève 1 milliard de dollars pour investir dans la réalité augmentée ; Tumblr a été vendu à Automattic, qui contribue très largement à WordPress, pour moins de 1% de son prix d’achat initial ; WeWork a réalisé une entrée en bourse très mitigée ; ça sent le roussi pour Uber et Lyft en Californie, une loi en discussion s’opposant frontalement à leur business model ; Porsche lance une voiture électrique, la Taycan ; Wikipedia a été touché par une attaque par déni de service de grande ampleur, revendiquée mais non justifiée par un groupe obscur ; les trottinettes électriques n’auraient aucun impact écologique positif ; et la CNIL irlandaise (décidément active cet été) a ouvert une enquête contre les pratiques cookies du groupe Verizon.

Faisons également un petit point cybersécurité, l’été ayant été chaud dans le domaine : quelques milliers de français ont été touchés par une attaque contre impots.gouv.fr, des hackers ont réussi à s’infiltrer dans des millions de smartphones, des centaines de milliers de personnes utiliseraient des mots de passe compromis, et il semblerait que les cyberattaques auraient permis à la Corée du Nord de toucher plusieurs milliards de dollars – c’est le bon moment pour faire le point sur les problèmes de sécurité les plus fréquemment identifiés par la CNIL. Des nouvelles intéressantes également sur la conquête de l’espace, puisque 39 galaxies “invisibles” ont été découvertes et que des observations sur l’expansion de l’univers semblent indiquer que nos modèles doivent être ajustés. Des questions juridiques intéressantes également, le débat sur les déchets spatiaux continuant (on vous en parlait en février 2018) sur fond d’enquête sur une potentielle infraction commise dans l’espace.

On enchaine sur l’actualité législative franco-européenne, qui n’est pas en reste : Politico a dévoilé le programme prospectif de travail de la future nouvelle Commission européenne, avec notamment un projet de régulation de l’IA et de révision de la directive eCommerce ; la France a notifié à la Commission la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur Internet (fin du status quo en novembre) ; un rescrit de Bercy précise les conditions d’assujettissement à la TVA des ICO ; la redevance copie privée va toucher les PC et les disques durs nus ; le prochain gros chantier en France est la réforme de l’audiovisuel, déjà décriée par les acteurs du cinéma, et qui devrait aboutir à une fusion du CSA et de la Hadopi. D’autres petites infos également à glaner dans ces deux récaps par NextINpact : le récap législatif et le récap tech. Surtout, à ne pas manquer, la consécration en langue française de la notion d’accord parapluie de protection des données personnelles ou encore de minage pirate.

Malgré les vacances judiciaires, également un certain nombre d’affaires intéressantes : la Quadrature du net n’a pas eu de repos, entre son contentieux contre la CNIL devant le CE sur la poursuite de la navigation (référé rejeté car affaire au fond plaidée le 30 septembre prochain), son recours contre le renseignement français devant la CJUE plaidé hier et une nouvelle action contre un décret de reconnaissance faciale (à noter d’ailleurs que la CNIL n’est pas favorable à l’expérience niçoise en la matière). Notons également une décision ordonnant à Google un déréférencement dynamique de sites contrefacteurs ; un avis positif de la CADA pour plus de transparence sur les algorithmes d’allocations familiales ; la validation sous conditions par l’ADLC de la création de Salto, le “Netflix” français ; l’opposition d’Orange à la communication de données personnelles liées à des IPs obtenues en violation du RGPD par un ayant droit ; et l’obligation pour Free de cesser de diffuser BFMTV sans accord de diffusion – à noter que la situation a également été tendue avec Orange avant rétablissement.

Enfin, en vrac, notons que l’open data des décisions de justice continue à faire couler beaucoup d’encre, à la fois sur l’anonymisation des parties, sur l’anonymisation des magistrats et sur les personnes qui en seront chargées – sujet notamment évoqué par Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassation, lors de sa prise de fonctions ; le droit à l’erreur dans les déclarations administratives expliqué ; le “.fr” fête ses 33 ans ; la Commission organise un dialogue des parties prenantes à la mise en œuvre du fameux article 17 de la Directive droit d’auteur (partage de la valeur) ; et le Parlement européen publie une étude sur la régulation de la blockchain et la CNIL une note sur les dark patterns.

Comme chaque semaine, nous vous avons sélectionné et résumé plus bas une poignée d’articles de grand intérêt, mais si vous voulez allez encore plus loin, en voici d’autres :

On se quitte sur un rap battle à propos du Bitcoin : quoi de mieux pour terminer de faire la Maj, et se dire à la semaine prochaine ?

Ce qu'on lit cette semaine

#libertéd'expression

#démocratie

#haine

#censure

#çavasansdire

Via The Economist

Comment va le monde en ce nouveau mois de septembre ? Voici quelques Maj que nous vous proposons un baromètre régulier de l’état de la liberté d’expression à travers la planète, d’article en article – le plus souvent, et c’est significatif, d’auteurs anglo-saxons. Le moins que l’on puisse dire est que la tendance n’est pas positive. Mais commençons par balayer devant notre porte : les statistiques rapportées par l’article font état, notamment, d’un recul remarquable de cette liberté dans les pays où elle est historiquement la mieux protégée ; or, qu’en est-il en France ? La fameuse loi dite Avia contre la haine s’apprête à reprendre son cheminement législatif, nonobstant les nombreuses critiques et inquiétudes soulevées à son encontre. La France aura également été le premier pays de l’Union à amorcer la transposition de la nouvelle directive Copyright, dénoncée de même pour ses risques de surcensure. Vivons-nous pour autant en dictature ? N’en déplaise à certains opposants politiques, vraisemblablement pas (ne serait-ce qu’à en juger par la rareté du port de chaussures à fermeture éclair sous nos latitudes) ; néanmoins, force est d’admettre que le climat n’est plus si marqué par la défense active de cette liberté, pourtant si chère à l’heure (déjà oubliée ?) du post-Charlie Hebdo. C’est que la libre circulation des idées et des opinions, dans une démocratie moderne, complexe, agitée, est un objectif ardu, difficile à ménager – et qui demande un peu plus, en toute hypothèse, qu’un simple grand débat.

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#google

#conflit

#techstorytime

Via Wired

Three Years of Misery Inside Google, the Happiest Company in Tech

Hier, Google tenait, pour ses employés, quelque chose de la fameuse land of opportunities américaine, où liberté d’expression et d’entreprendre et morale progressiste permettait à chacun de s’épanouir et de participer à une émulation collective fondue dans une grande marche vers un avenir meilleur. Depuis quelques années, et surtout l’investiture de Donald Trump, les rapports entre direction et employés de Google se sont ternis. Après avoir interrogé près de 50 employés actuels et anciens du GAFAM, Wired nous livre une retrospective d’anthologie sur les clivages qui ont bousculé la chocolaterie de Sundar Pichai. On vous laisse découvrir.

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#intermédiairestechniques

#Régulation

#responsabilité

#pleasedon’t

Via MIT Tech Review

C’est le débat sur la responsabilité des intermédiaires techniques à la sauce américaine. Depuis quelques temps des politiques de tous bords s’interrogent sur le bien fondé de changer la section 230 du Communications Decency Act. Cette disposition, qui fut clef dans le développement d’Internet, aménage un dispositif (avec exceptions), pour les intermédiaires, d’exonération de responsabilité pour le contenu de tiers qu’ils hébergent y compris lorsque les hébergeurs opèrent une modération. C’est ainsi que les conservateurs reprochent aux réseaux sociaux de se cacher derrière la section 230 pour pouvoir librement supprimer les contenus anti-conservateurs et imposer leur morale démocrate au monde (au sens de la politique américaine), c’est ainsi également que Nancy Pelosi reproche au texte de désinciter les acteurs à véritablement modérer les contenus dangereux (dont les fausses vidéos dont elle a fait l’objet). Quelque soit l’issue du débat, l’on espèrera que le décret de Donald Trump d’imposer des guidelines pour la régulation de contenu ne verra pas le jour.

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#opendata

#avocats

#référencement

#plateformes

#attrapezlestous

Via Village Justice

Notation des Avocats, algorithmes et Open Data des décisions de justice : les liaisons dangereuses

Il est des controverses qu’un été ne parvient pas à dissiper, et qu’on retrouve intactes à la rentrée des classes : tel est le cas de l’open data des décisions de justice, analysée ici (c’est plus rare) sous l’angle de son impact sur les avocats eux-mêmes. Le propos brosse large, mais l’on en retiendra une idée : ce qui se joue en creux dans les revendications de “transparence” liée à l’open data, c’est pour les avocats une dépendance accrue à des plateformes de référencement, et plus généralement des “algorithmes”, avec pour conséquence le recul d’une certaine idée de la profession, c’est-à-dire peu ou prou celle cristallisée dans les règles déontologiques actuelles. Que faut-il donc en penser ? Selon nous, que le problème, en tant qu’il touche aux avocats, n’est pas si simple, et ne se limite pas, loin s’en faut, à l’open data des décisions de justice : il a ses ressorts dans des choix politiques de la profession, dans l’inflation du nombre d’avocats et la précarisation du métier qui, pour une large part, en découle, enfin dans le mouvement global de “transparence” économique et sociétale dont la justice n’est qu’un des domaines d’application. De là à dire que l’open data et les plateformes de référencement sont l’ennemi, le pas est trop vite franchi, et rejoint celui d’un législateur qui aura préféré l’interdiction pure et simple à des mesures raisonnées. Un discours documenté, qui mérite d’être connu, en somme, ne serait-ce que pour connaître les raisons de s’en distancier.

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#8chan

#fusilladed’elPaso

#cloudflare

#baisserlagarde

Via NY Times

C’est la plongée dans un dilemme personnel, à la croisée de considérations éthiques et business, dans le sillage de l’onde de choc produit par la fusillade d’El Paso aux Etats-Unis en août dernier. Quelques jours après les faits, il a en effet été révélé que le suspect appréhendé par les autorités américaines avait publié un manifeste sur le site 8chan, notoirement connu pour être utilisé comme plateforme d’échanges par les suprémacistes blancs. C’est alors que le fournisseur de solution de sécurité d’8chan, Cloudflare s’est vu présenter un choix : continuer ou interrompre la fourniture de ses services. Pour la première fois de son histoire, alors qu’elle avait toujours revendiqué être neutre quant aux sites que son outil protégeait, la société a décidé de fermer les vannes, résultant dans la mise à nu d’8chan qui fut rapidement hors service. Plongée dans les réflexions d’un CEO qui avait le pouvoir d’agir et qui s’est dit « trop c’est trop ».

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#techno-éthique

#IA

#toutestrelativisé

Via The Economist

Don’t be evil?

Cela fait désormais un certain temps que quelques grands thèmes de la réflexion en matière de l’éthique de l’IA ont émergé : explicabilité des décisions, incomplétude ou erreurs dans les jeux de données nourrissant les algorithmes apprenant, et réplication des discriminations de leurs concepteurs. Et, de nombreuses initiatives, parfois d’envergure, ont déjà vu le jour : formations transdisciplinaires dans les universités, white papers et guidelines dans tous les sens et récente adoption des principes de conception de l’IA dégagés par l’OCDE par le G20… Si de nombreux acteurs sont donc conscients des enjeux et des directions dans lesquelles avancer, l’éthique de l’IA commence aujourd’hui à se heurter à l’épreuve du réel, de la realpolitik, des engagements de façade et des divergences de conceptions morales. La grande difficulté pour l’éthique de l’IA est donc aujourd’hui de trouver un contenu, une substantifique moelle, derrière lequel tout le monde pourra se ranger. L’affaire n’est pas mince, sachant qu’il n’est pas sûr que cela ait été réussi avec les droits de l’homme.

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#concurrence

#facebook

#data

#transparence

#çaresteentrenous

Via NY Times

How Facebook Is Changing to Deal With Scrutiny of Its Power

Un autre de ces sujets mis en pause pendant l’été, qu’on ne s’étonne pas de retrouver ragaillardi en septembre : qu’en est-il du démantèlement tant évoqué de Facebook ? Pour rappel, le projet (si tant est qu’il soit si concret qu’on puisse le présenter ainsi), commun à d’autres “GAFAM”, tient du constat de ce que Facebook, au gré d’acquisitions majeures de ses potentiels concurrents, a consolidé en quelques années une position dominante aujourd’hui perçue comme une menace. Assise sur une montagne de données, dont on l’a vue mésuser, et disposant d’un pouvoir incontrôlé sur les ressorts de nos sociétés démocratiques, Facebook devrait donc être ramenée à une taille plus propice à sa régulation. Quoi qu’on en pense (et le débat est complexe, cela va sans dire), l’intéressée semble avoir pris la mesure du risque, et adapté sa stratégie en conséquence : réduction du rythme des acquisitions, réorganisation interne, restructuration technique des liens entre les applications, présentation agrégée des résultats – toute l’idée serait de rendre un projet de démantèlement plus difficile à mettre en œuvre, à la fois politiquement et techniquement. Pas sûr que cela suffise aux régulateurs ; mais ici comme ailleurs, tout sera effectivement question de volonté politique.

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Le Gif de la semaine

À la semaine prochaine, si on réussit à gravir cette montagne d'actu !