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Celle qui ne porte plus le voile – Maj du 17/12/19

L'actu en bref

Cette semaine, la procédure civile a beaucoup changé avec la parution d’un décret de réforme en profondeur pour une entrée en vigueur… le 1er janvier ! La pause hivernale sera studieuse, on remercie le CNB pour ces fiches pratiques. Sinon, l’État de la Nouvelle-Orléans a déclaré l’état d’urgence à la suite d’une cyberattaque, Jack Dorsey a annoncé travailler sur un standard de réseau social décentralisé, le patron de Snapchat a été naturalisé français, les États-Unis se penchent sur une réforme de la responsabilité des hébergeurs, The Pirate Bay tente de ressusciter dans le streaming, Facebook prend un peu de retard sur sa Cour Suprême, YouTube renforce ses règles contre les insultes personnelles, et les GAFAM restent les plus gros contributeurs à l’open source, malgré tous leurs défauts – d’ailleurs la palme GAF(fe)AM de la semaine revient ex aequo à Google et son projet de smart city à Toronto, révélé aller un peu beaucoup trop loin dans les recoupements de data, et Facebook, qui a vu les données bancaires de 29 000 salariés disparaitre dans la nature sur un disque dur volé. Chez nous, notons la saisine de la CNIL par NOYB pour des cookies déposés même en cas de refus, CNIL qui publie un guide sur l’impact de la tech sur la démocratie et une nouvelle page sur les bases légales de traitement, très complète, pendant que l’EDPB soumet à la consultation de nouvelles guidelines sur le droit à l’oubli et qu’Apple est le dernier des GAFAM en date à être assigné par l’UFC pour ses CGU. On se quitte sur un beau deal pour Canal+ qui sera distributeur de Disney+ en France et sur une note plus sérieuse, une rare interview de la première présidente de la Cour de cassation Chantal Arens. On se quitte d’ailleurs pour deux semaines, pas de Maj sous le sapin mais on espère que vous passerez d’excellentes fêtes tout de même !

Faites la Maj, et à l’année prochaine !

Nous en sommes déjà à la dernière Maj de l’année. Si 2018 a été l’année de l’apogée de la défiance envers les géants du net, 2019 restera probablement dans les mémoires comme celle des premiers retours de bâtons : droits voisins des éditeurs de presse, loi contre la haine en ligne, amendes pour violation des données personnelles en Europe comme aux États-Unis et enquêtes en droit de la concurrence à l’international, les géants du net sont attaqués sur tous les fronts partout dans le monde.

Les CEOs et les enfants d’abord

Certaines de ces attaques sont structurelles : une part de la défiance envers les grandes sociétés du net est justement due à l’adjectif “grand” que nous sommes tenus d’utiliser dès lors que nous les visons – trop de pouvoir tue le pouvoir. Mais au-delà de ces questions de taille, il est indéniable que chaque semaine apporte son lot de nouvelles découvertes de méfaits, négligences et autres mésactions commises par nos amis les géants, au point que l’on peut désormais consacrer une rubrique “GAF(fe)AM” à ce sujet dans notre actu en bref hebdomadaire. L’ensemble de l’arsenal juridique existant est mobilisé pour remettre nos colosses dans le droit chemin et puisque celui-ci ne semble pas suffire, l’on ne cesse de créer de nouveaux outils pour les contraindre. Mais rien n’y fait : les amendes sont payées ou provisionnées, les litiges font soit l’objet de transactions confidentielles (y compris en France avec l’administration fiscale), soit durent trop longtemps pour que quiconque s’en soucie réellement à la fin. Le résultat est là : la santé financière des mastodontes du web est insolente, et continue de dépasser l’entendement comme les affaires.

Une statistique intéressante à mettre en corrélation avec ce constat est le nombre de départ de grands CEOs : 2019 est en train de battre tous les records de départs (volontaires comme forcés) de dirigeants de grandes entreprises (tous secteurs cofondus, la tech menant la danse). Alphabet (Google), SAP, WeWork, Expedia, eBay, Juul : autant de sociétés qui auront vu leurs dirigeants, parfois également cofondateurs, quitter le navire en 2019. Même lorsque ces départs sont forcés pour sauver l’entreprise, quitter une position de leader d’une grande société est une opération rentable : Adam Neumann, le cofondateur et président de WeWork, a ainsi été littéralement racheté par SoftBank pour être mis sur le carreau après avoir quasiment détruit son entreprise, tout en empochant un petit milliard de dollars au passage.

Soulever le voile de la personnalité morale

Le monde se retourne contre la big tech et ses dirigeants sautent dans les canoës de sauvetage : difficile de ne pas avoir envie de soulever le voile de la personnalité morale. Les entreprises sont des fictions juridiques dont le principal intérêt est la séparation des responsabilités et patrimoines, entre ceux des individus (en particulier les dirigeants) qui la composent et ceux de l’ensemble ainsi formé. La fiction est telle que Yuval Noah Harari, dans son livre Homo Deus, conclut que la création de telles fictions est la caractéristique essentielle de l’humanité, et que la fiction “Google” n’est pas très différente de celle des fidèles de Sobek dans l’Égypte antique : les adorateurs du dieu crocodile étaient tout aussi organisés, productifs, et utiles à la société que les Googlers, et leur organisation tout aussi fictionnelle. Toute la difficulté, lorsque l’on se penche sur la responsabilité des entreprises, est ainsi de déterminer si c’est “l’entreprise” qui a agit, ou si au contraire une personne a dépassé le cadre de ses fonctions et de ce qui était attendu de lui ou elle… ou les deux ? Dans des entreprises toujours contrôlées par une seule ou une poignée de personnes, serait-il si inconcevable de soulever, même très légèrement, le voile de la personnalité morale ?

Peut-être que nous pourrions retrouver ainsi la morale cachée dans l’expression “personne morale” : nous avons rapidement cherché, sans trouver, l’étymologie de cette expression très française utilisée pour désigner les entités juridiques. Mais cette spécificité française est peut-être heureuse : l’incorporation de la morale dans le fonctionnement des entreprises est dans l’ère du temps, entre politiques RSE qui deviennent la norme (souvent pour constituer un nouveau type de voile) et création récente en droit français de la raison d’être, “constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité“. Les notions sont récentes, mais leur impact se fait déjà sentir : Samsung a récemment été mise en examen pour pratiques commerciales trompeuses en raison de l’inadéquation entre ses pratiques et ses affirmations publiques. 2020, année du retour de la personne morale ?

Le Gif de la semaine


À l'année prochaine, toujours avec swag !