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Celle qui ne se fait pas passer pour un humain – Maj du 15/05/18

Ces récentes années ont définitivement marqué une rupture d’image et de confiance entre le grand public et les géants du net : si les services rendus par ces derniers sont plus qu’appréciés et appréciables, la lune de miel  et l’amour inconditionnel sont désormais bien loin et l’époque est désormais à la responsabilisation de ces acteurs. La question reste de savoir si ce changement d’attitude a été perçu et compris par les grandes entreprises du net. La pertinence de cette question est d’autant plus renforcée quand on voit que Facebook se presse d’annoncer un nouveau service de rencontres en ligne alors que le scandale Cambridge Analytica n’est même pas encore terminé, ou que Google annonce fièrement avoir réussi à tromper des centaines d’opérateurs téléphoniques avec une nouvelle intelligence artificielle.

L’IA qui murmurait à l’oreille des humains

Baptisé Google Duplex, le nouveau service de Google est ainsi capable d’appeler un salon de coiffure pour prendre un rendez-vous ou un restaurant chinois pour réserver une table, et ce avec une voix et des intonations et des tics de langage ô combien réalistes. L’IA conversationnelle est capable de saisir les nuances de la conversation et de s’adapter en cours de route aux imprévus qui caractérisent les êtres de chair que nous sommes. Ces appels sont passés sur commande, à distance, pendant que vous pouvez vaquer à vos occupations.

La prouesse technologique est réelle et ne peut qu’être admirée : en mêlant apprentissage machine, reconnaissance de texte, reconnaissance vocale, compréhension du langage et algorithmes de retranscription de la voix vers le texte et du texte vers la voix, Google est parvenue à créer un outil impressionnant de justesse. Mais cela a été fait dans le plus grand secret, sans que la moindre réflexion éthique ait été intégrée. Preuve en est que l’algorithme ne se déclare jamais comme tel, au contraire ! La prouesse consiste bien à réussir à ne pas se faire reconnaitre, ou, dit autrement, à tromper l’interlocuteur.

Réfléchir avant d’agir : l’une des premières leçons de l’enfance

Bien entendu, les réactions ne se sont pas faites attendre : de nombreuses voix se sont élevées contre cet outil qui non seulement est susceptible de bouleverser le monde du travail, mais en plus s’attaque directement aux relations humaines en prétendant remplacer des interactions entre personnes par des interactions avec un robot. La réponse de Google a également été prompte, en promettant que Duplex serait “adéquatement identifié“, sans expliquer pour le moment les mesures concrètes qui seront prises.

Ce qui semble problématique en l’espèce n’est pas tant l’innovation en elle-même, mais plutôt le manque total de prévoyance de Google à son égard. Il est évident qu’un tel produit a fait l’objet d’une multitude de réunions pré-lancement, et pourtant, aucune information n’a été communiquée sur les garanties de transparence et d’ouverture qui peuvent être légitimement attendues à la sortie d’une telle nouveauté. Ainsi, une grande réussite technologique est éclipsée par l’absence éclatante de réflexion éthique, à une époque où celle-ci est devenue déterminante pour le grand public. Il semble ainsi exister un véritable décalage entre les géants du net et le grand public, et la question est désormais de savoir comment le régler : autorégulation, code de bonne conduite, réglementation segmentée, régulation générale, renforcement de la responsabilité, obligations déontologiques, démantèlement ? Autant d’options actuellement en débat, reste à savoir la ou lesquelles seront mises en œuvre – et à cette question, la réponse n’est pas sur Google.

L’actu en bref

Sinon cette semaine, on est plus qu’à 10 jours du GDPR, et du coup on vous propose un super moteur de recherche full-text de notre règlement préféré, une playlist de musique thème RGPD, le projet de loi données personnelles définitivement adopté par l’Assemblée nationale hier et une méthode géniale pour vous mettre en conformité en 10 minutes, tandis que la CNIL met en ligne un nouveau modèle de registre pour les PME. En d’autres news, il est vivement conseillé de changer son mot de passe Twitter,  plus de détails sont connus sur l’accident mortel entre une voiture autonome Uber et une cycliste, Telegram n’a plus besoin d’une ICO publique, Facebook a réorganisé ses équipes et passe à la blockchain, le dernier télégramme de France ne l’était pas vraiment, et Wired vous propose de tout comprendre sur Crispr. En ce qui concerne la jurisprudence, les tribunaux allemands ont fait fort en sanctionnant le projet d’ebook Gutenberg et en ordonnant un retrait de contenu mondial à Facebook.

À ne pas rater cette semaine

Surtout, on vous propose donc de plonger dans les news des grandes conférences développeurs de ces dernières semaines avec un article sur Google Duplex et un autre sur les annonces de Facebook. L’IA est également à l’honneur avec une communication de la Commission Européenne et un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation sur l’introduction de Watson d’IBM dans une entreprise, qui ne constitue pas un changement important des conditions de travail. Également au programme, un excellent article du Monde sur la manière dont la vie d’un citoyen français a été bouleversée le jour où il a perdu son passeport, qui s’est retrouvé utilisé par un baron du darknet, une proposition de règlement sur les relations entre professionnels sur les plateformes en ligne, et un article sur les opérations de Goldman Sachs dans le Bitcoin. On conclut la semaine avec une belle réflexion sur le statut de la donnée aujourd’hui, et une shower thought tout aussi belle d’Adrien sur la relation entre un sous-traitant établi dans l’UE et ses propres prestataires établis ailleurs : contrat ou pas ?

Faites la Maj, et à la semaine prochaine !

Signé Aeon


#gdpr

#contrat

#sous-traitance


Sous-traitant établi dans l’Union Européenne, dois-je conclure un contrat avec mes clients qui ne le sont pas ?

L’une des principales innovations du GDPR est de s’intéresser d’un peu plus près à la figure du sous-traitant, notamment en formalisant la relation entre sous-traitant et responsable de traitement. Mais le texte ne précise pas si les règles de contractualisation ainsi définies s’appliquent lorsqu’un sous-traitant européen travaille pour une entreprise américaine : c’est le mystère dans lequel Adrien vous propose de plonger.

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Le Gif de la semaine


A la semaine prochaine, sans toucher le sol !